Dix ans en 2019 : rencontre avec Carine Pahaut

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Lequel d’entre vous n’a jamais aperçu le sourire de Mme PAHAUT lors d’un colloque du Barreau, d’une réunion de commission ou dans l’ancienne bibliothèque, toujours occupée par l’équipe administrative de l’Ordre ? Carine PAHAUT soufflera prochainement sa dixième bougie de services pour l’Ordre. L’équipe de l’Open Barreau l’a rencontrée pour dresser le bilan de cette décennie de bons et loyaux services.

Ses collègues la décrivent comme étant efficace et polyvalente. Elle est toujours disponible et se propose régulièrement pour leur apporter son aide. Elle sait également se montrer malicieuse et taquine.

Elle apprécie les bons repas en famille ou entre amis. Elle est amatrice de bières et est toujours prête à faire la fête aux côtés de son mari, guitariste. Pendant ses vacances et à la moindre l’occasion, elle sillonne la France, en famille, aux commandes de son mobil-home, en laissant, sans regret, téléphone portable et télévision à la maison. Selon Mme CAZZETTA : « Pour Carine, une journée idéale, c’est rock’n’roll sans wifi. »

Carine

Claire Hazée : Depuis combien de temps êtes-vous au service de l’Ordre ?

Carine Pahaut : Cela fera 10 ans le 2 janvier prochain. J’ai commencé en 2009. Avant de rejoindre l’équipe de l’Ordre, j’ai travaillé pour un avocat durant vingt-trois ans. Je me trouvais donc, en quelque sorte, de l’autre côté de la barrière.

CH : En effet, vous connaissiez donc déjà le milieu des avocats. Nous souhaiterions en savoir davantage sur vous. D’où provenez-vous ? Etes-vous liégeoise ? Comment avez-vous été amenée à intégrer le personnel de l’Ordre ?

CP : Oui, je suis liégeoise. Plus précisément, je proviens d’Ougrée et j’y ai toujours habité. Je me suis mariée et ai vécu à Vivegnis, puis à Fexhe-Slins, en pleine campagne, puis retour aux sources, à Seraing. J’ai deux enfants, Lionel 26 ans, Maureen 14 ans.

J’ai donc travaillé plus de vingt ans pour un de vos confrères liégeois. Malheureusement, il a dû réorganiser son cabinet. A cette époque, l’Ordre cherchait à intégrer quelqu’un dans son équipe administrative, principalement pour la Commission des honoraires. Je me suis présentée et ai été embauchée en 2009 sous le bâtonnat de Me Patrick HENRY.

CH : Les avocats impliqués dans les commissions de l’Ordre vous connaissent inévitablement pour vous y avoir rencontrée à de nombreuses reprises. Certains d’entre eux vous côtoient même régulièrement, puisque vous assumez avec brio la tâche de secrétaire au sein de plusieurs de ces commissions. Je crois savoir que vous ne faites pas que cela. Pourriez-vous nous expliquer en quelques mots en quoi consiste votre travail au quotidien ?

CP : Lorsque j’ai intégré l’équipe de l’Ordre, j’ai commencé à travailler pour la Commission des honoraires. Parallèlement à cela, j’aidais beaucoup Silvia au Bâtonnat : je la remplaçais quand elle était en congé. Ensuite, Eric FRANSSEN m’a gentiment délégué les conférences économiques parce que ses propres activités se sont étendues. J’ai ensuite continué à multiplier les casquettes : je m’occupe à présent également du centre de médiation, du centre d’arbitrage de l’Euregio, du droit collaboratif, du Conseil de discipline, de l’organisation des colloques, des avis au Conseil supérieur de la Justice, en plus donc de la Commission des honoraires pour laquelle j’avais initialement été engagée.

J’adore ce que je fais. Mon travail au quotidien est très diversifié et, si j’ai la chance de pouvoir travailler de manière autonome, ce que j’apprécie beaucoup, je peux compter à tout moment sur le soutien de mes collègues.

Carine_Chemin

CH : L’une des particularités de votre occupation professionnelle réside dans le fait que, tous les deux ans, vos collègues et vous devez travailler sous l’impulsion d’un nouveau Bâtonnier. Ceci implique peut-être que vous deviez adapter votre façon de travailler. Ce changement périodique n’est-il pas trop contraignant ? Comment procédez-vous pour adapter votre travail tous les deux ans en fonction des élections ?

CP : Nous pourrions dire que nous sommes comme des caméléons : nous nous adaptons en fonction du Bâtonnier en exercice.

A mon niveau, je suis plutôt en deuxième ligne. Ce changement régulier ne m’affecte donc pas particulièrement. Parfois, certains bâtonniers émettent de nouvelles idées ou décident de modifier la méthode de travail : par exemple, l’année dernière, Mme le Bâtonnier a souhaité expérimenter un nouveau mode de fonctionnement pour les avis magistrature et nous l’avons testé et mis en place. Et l’an prochain, je sais déjà que nous reviendrons à la procédure initiale. Je n’ai pas encore rencontré de problème particulier qui soit insurmontable, je m’adapte à toutes les situations.

CH : Certains Bâtonnier ont-ils été plus difficiles à vivre que d’autres (des noms ?) ?

CP : Chaque personnalité est différente et chacun a son caractère et sa manière de travailler. Je pense avoir assez d’empathie pour m’adapter facilement aux personnes. Si un Bâtonnier vient à se fâcher, je laisse passer l’orage.
Je ne suis cependant pas en première ligne des contacts avec le Bâtonnier. Je n’ai pas vraiment de contacts journaliers avec lui. Je ne suis amenée à le rencontrer que deux à trois fois par semaine.

CH : C’est déjà pas mal ! Vous avez donc intégré l’Ordre il y a 10 ans. Le Barreau de Liège a-t-il changé depuis lors ? Si oui, estimez-vous que ces changements soient positifs ?

CP : Les choses ont évolué en effet. La masse de travail a considérablement augmenté. Au début, j’aidais Simone Mertens pour l’alléger de certaines petits travaux (tels que le classement, les photocopies), en plus d’aider Silvia et de m’occuper de la Commission des Honoraires. Petit à petit, d’autres tâches se sont ajoutées à mon quotidien.

Finalement, l’Ordre a engagé Bérénice pour compléter l’équipe mais elle-même sature à son tour, notamment et entre autres avec l’avènement des cartes professionnelles.

Depuis peu, un nouveau logiciel de gestion des Ordres a été mis en place. Cela a également nécessité que nous changions notre méthode de travail. C’est pour moi une petite révolution au niveau de la manière de travailler quand on sait que j’ai connu la machine à dactylographier et la sténo ! En effet, lorsque j’ai débuté, en 1986, nous avions une machine à écrire – électrique quand même ! (avec carbone et l’indispensable tipp-ex), puis nous sommes passés à l’ordinateur (le gros téléviseur Macintosh avec disquettes) et ensuite les PC sont devenus de plus en plus minces et même portables, dotés d’Internet. Bref, j’ai traversé ces diverses périodes sans trop de difficultés. Donc, le mot clé est adaptation.

CH : Justement, l’informatisation ne vous a-t-elle pas facilité la tâche ? On pourrait penser que vous auriez gagné du temps en étant mieux équipée.

CP : Comme dans beaucoup de domaines, je dirais qu’il y a du pour et du contre. Tant que l’informatisation ne remplace par la main-d’œuvre, je dirai que oui. Nous débutons avec ce programme que nous avons testé pour le finaliser et qui a dû être ajusté en fonction de nos besoins. Certes, c’est un très bel outil mais je ne vous cache pas que, pour ma fonction, il y a encore quelques petits « réglages » à faire et il qu’il faut un temps d’adaptation pour acquérir d’autres réflexes et travailler « virtuellement ». Le but final est de ne plus devoir travailler dans des dossiers papier mais je pense que le programme est un peu en avance par rapport aux moyens dont nous disposons (c’est-à-dire que l’heure n’est pas encore venue pour un avocat rapporteur de venir tenir une audience sans dossier « papier » sous le bras, moins écologique mais plus rapide et facile à consulter)…. Par contre, je suis plus optimiste quant à l’arrivée du logiciel pour la formation permanente, celui-là devrait grandement me faciliter la tâche.

CH : Quels sont le meilleur et le pire souvenir de votre carrière ?

CP : Le « pire » souvenir date du tout début de ma carrière pour l’Ordre. Quand j’ai débuté, Silvia m’a écolée. J’avais minutieusement rempli tout un classeur de notes avec les différentes procédures et consignes à mettre en œuvre. Une fois rentrée chez moi, je me suis dit : « Je ne vais jamais y arriver, il y a beaucoup trop à assimiler !». Comme j’étais déjà dans le domaine juridique, cela m’a beaucoup aidé et avec le recul, je me dis que ce n’était pas si compliqué que ça.

Un bon souvenir ? Chaque journée est un bon souvenir parce que j’ai des collègues super sympas. Nous formons une équipe dynamique dans laquelle je me suis, grâce à eux, facilement intégrée. Nous avons fréquemment des moments de fou rire et cela booste notre journée, qui est, faut-il le dire, bien remplie. En effet, nous rencontrons des situations stressantes et travaillons dans l’urgence en raison d’échéances, d’événements ponctuels ou de surcroîts de travail mais nous pouvons compter les uns sur les autres.

CH : Vous savez que la profession d’avocats est fréquemment remise en cause pour différentes raisons (adaptation au numérique, responsabilité professionnelle, développement de l’offre de services juridiques parallèles à moindre coût, etc.), tant par les avocats eux-mêmes que par le monde politique ou les justiciables. Vous qui connaissez bien cette profession pour être quotidiennement amenée à travailler avec des avocats, sous quels aspects pensez-vous que nous devrions revoir notre façon de penser ou de travailler ?

CP : Je n’ai pas les compétences pour vous répondre mais voici quelques constatations personnelles.

La profession est, comme vous le dites, en constante mutation : vous devez faire face, entre autres, au numérique et en supporter les frais, sans parler de l’aberrant assujettissement à la T.V.A. (ou comment faire rentrer des fonds dans les caisses de l’Etat sur le malheur des gens), à la nouvelle procédure en matière d’aide juridique, des suites du rapport sur l’avenir de la profession, une prochaine éventuelle fusion.

Tout changement fait peur. Certains avocats plus âgés m’ont confié penser arrêter la profession, tout devenant trop onéreux, trop contraignant et surtout trop compliqué. Il leur manque le temps pour l’essentiel : le contact. Et du côté du justiciable, de ce que j’entends quotidiennement, l’avocat est perçu comme : « trop cher, trop pressé, invisible même, incompréhensible ».

Le système politique, imposant ses réformes contraignantes mais aussi ses taxes, est en train de « casser » l’ensemble des professions. Vu la hausse du coût de la vie en général, il sera difficile pour un avocat professant seul d’y faire face et les petites structures risquent d’être absorbées par les plus importantes.

J’ai pu constater depuis 10 ans que le nombre d’avocats participant aux manifestations de l’Ordre (festivités, colloques, formations en tous genres, conférences et même référendum…) est en constante diminution. Par manque de temps ? d’intérêt ? d’argent ? ou doivent-ils justement se concentrer sur toutes ces innovations et les complications bureaucratiques qui en découlent ?

Carine_Durbuy

CH : Pour conclure, auriez-vous une anecdote croustillante à nous livrer sur ce qui se trame dans les couloirs de notre Ordre ?

CP : Plus rien n’est remonté jusqu’à mes oreilles depuis la dispersion des juridictions dans les annexes du Palais, la délocalisation du mess et des boîtes palais…

Interview réalisée par Claire HAZEE.
OB

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