Compte rendu du colloque du 20 septembre 2018

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Ce 20 septembre 2018, la Commission de droit public du Barreau de Liège organisait un colloque consacré à la demande d’indemnité réparatrice devant le Conseil d’Etat.

Quessako ? Jusqu’en 2014, le requérant qui obtenait l’annulation d’un acte administratif devant le Conseil d’Etat ne pouvait pas obtenir une compensation financière destinée à réparer le préjudice consécutif à l’illégalité constatée. Il devait s’adresser aux juges de l’ordre judiciaire. La 6e réforme de l’Etat a modifié l’article 144 de la Constitution et ajouté un article 11 bis aux lois coordonnées sur le Conseil d’Etat afin de permettre à la Haute Juridiction administrative d’accorder elle-même une telle indemnité « réparatrice ».

Cette réforme est entrée vigueur le 1er juillet 2014. Après 4 ans d’application, la Commission de droit public a estimé qu’il était temps de faire le point sur cette nouvelle notion.

Ce colloque, organisé au Campus du Sart-Tilman de l’Université de Liège, a accueilli des orateurs de qualité, tels que M. Michel PÂQUES, ancien conseiller au Conseil d’Etat et nouvellement nommé juge à la Cour constitutionnelle, M. Luc DONNAY, auditeur au Conseil d’Etat, bien connu des plaideurs devant la Haute Juridiction, ou encore M. le professeur Bernard DUBUISSON, figure non moins connue de la matière de la responsabilité civile.

Le colloque faisait également la part belle aux praticiens avec l’intervention des confrères suivants : M. le bâtonnier Pierre HENRY, Me Jean-Marc RIGAUX, Me Xavier CLOSE, Me Martin LAUWERS, Me Elisabeth KIEHL, Me Louis DEHIN ou encore Me Pierre LEJEUNE.

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Enfin, la matière étant au croisement des juridictions judiciaires et administratives, M. Firass ABU DALU, juge au Tribunal de première instance de Liège, était également invité à intervenir.

M. PÂQUES et M. DONNAY ont introduit la matière en rappelant le célèbre arrêt « La Flandria » de 1920 depuis lequel la question de la responsabilité de l’administration ressortit à la compétence du juge judiciaire. Depuis le 1e juillet 2014, une vingtaine d’arrêts ont été rendus dans la matière avec des indemnités ne dépassant généralement pas les 10.000,00 €.

M. le bâtonnier Pierre HENRY nous a entretenus de la notion « electa una via », ou de la nécessité de choisir si l’on souhaite demander la réparation du préjudice causé par l’illégalité devant le Conseil d’Etat ou devant le juge judiciaire, d’une façon fort didactique.

M. le juge Firass ABU DALU s’est interrogé, au cours d’une intervention pointue et magistrale, sur la légitimité d’assimiler une personne publique à un particulier en faisant relever la question de la responsabilité des pouvoirs publics du pouvoir judiciaire. Il s’est ainsi demandé si la séparation des pouvoirs autorise un juge à se placer à la place de l’administration afin de juger si le comportement pris par l’administration, en l’espèce, relève du raisonnable.

Me Jean-Marc RIGAUX a passé en revue les différentes parties à la cause et leur rôle dans une procédure en indemnité réparatrice. Il pointe ainsi l’intervention de l’auditorat dans une matière purement civile. Il relève également une question préjudicielle posée par le Conseil d’Etat à la Cour constitutionnelle sur une éventuelle discrimination subie par la partie adverse en ce qu’elle ne dispose pas du choix procédural pour cette procédure en indemnité réparatrice.

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Me CLOSE et Me LAUWERS ont fait un brillant exposé sur des questions techniques de procédure comme la question des délais à respecter pour introduire une demande d’indemnité réparatrice, mais également les conditions de forme à respecter dans une telle requête. Il en ressort un conseil : mieux vaut introduire la demande d’indemnité réparatrice après l’arrêt d’annulation de l’acte attaqué mais tout en se préparant à l’avance afin d’avoir un dossier complet au moment de l’arrêt d’annulation.

Me KIEHL nous a entretenus de la notion de préjudice qui doit être personnel, certain, né et actuel mais également résiduel, c’est-à-dire que le Conseil d’Etat n’indemnise, par l’indemnité réparatrice, que ce qui n’a pas été réparé par l’arrêt d’annulation. Le Conseil d’Etat semble ainsi peu enclin à accorder une indemnité pour un préjudice moral.

M. le professeur DUBUISSON a évoqué trois théories du droit commun de la responsabilité, à savoir les théories de l’équivalence des conditions, de l’alternative légitime et de la perte de chance et a constaté que le Conseil d’Etat applique ces trois théories dans des proportions variables.

Me Louis DEHIN s’est penché brièvement sur les notions de dépens et d’indemnité de procédure.

Enfin, Me Pierre LEJEUNE a résumé le colloque dans des conclusions fort complètes.

Florence NATALIS
Florence Natalis

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